Les ministres européens de l’Agriculture sont « très très sceptiques » sur l’avenir du vaste accord commercial entre l’UE et les pays sud-américains du Mercosur, a affirmé mardi la ministre allemande Julia Klöckner, en raison de la déforestation massive au Brésil.
« Nous, les ministres de l’Agriculture (des 27) sommes très très sceptiques à ce sujet (ndlr: la ratification de l’accord). Et je peux véritablement parler pour pratiquement chacun des ministres présents ici », a déclaré Mme Klöckner à Coblence (ouest de l’Allemagne) avant l’ouverture d’une réunion informelle des ministres de l’Agriculture et de la pêche des Etats membres de l’UE.
Ce vaste accord de libre-échange a été signé l’an passé entre l’Union européenne et le Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay et Paraguay), mais pour pouvoir définitivement être validé, il doit encore être ratifié par tous les parlements nationaux.
Or, les Parlements autrichien et néerlandais ont rejeté l’accord sous sa forme actuelle. D’autres pays comme la Belgique, la France, l’Irlande ou le Luxembourg se sont montrés réticents.
Figurant longtemps parmi les grands promoteurs de cet accord, qui ouvrait des débouchés à sa puissante industrie exportatrice, Berlin a récemment fait volte-face.
« Nous voyons au Brésil que la forêt (amazonienne) est brûlée pour laisser place à des terres agricoles aussi rapidement que possible » et dont les cultures « sont alors vendues sur nos marchés — où nos agriculteurs sont incapables de rivaliser (…) C’est une distorsion de la concurrence », a insisté Mme Klöckner.
« Je ne vois pas une ratification de l’accord Mercosur pour l’heure. J’ai des raisons très précises pour lesquelles je suis extrêmement sceptique », a insisté la ministre allemande, dont le pays occupe depuis juillet la présidence tournante de l’UE.
La chancelière allemande Angela Merkel avait pour la première fois le 21 août émis de « sérieux doutes » sur l’accord commercial, pointant du doigt la « déforestation continue » et « les incendies », qui se sont multipliés ces dernières semaines en Amazonie.
L’accord UE-Mercosur concentre les attaques des écologistes, qui dénoncent la plus grande ouverture des marchés européens à la viande sud-américaine, alors que l’élevage est responsable de 80% de la déforestation en Amazonie, selon l’organisation WWF.
Pour répondre à ces critiques, un chapitre couvrant notamment la « conservation des forêts » avait été intégré au texte final.
Le président français Emmanuel Macron avait menacé de ne pas ratifier l’accord, si le gouvernement brésilien de Jair Bolsonaro ne prenait pas les mesures nécessaires pour protéger la plus grande forêt tropicale du monde. Or, les incendies ont progressé de 28% en juillet 2020, par rapport à juillet 2019.